Couverture livres audio Shockaholic

Audiobooks : mon expérience avec les livres audio

En 2018, je me suis timidement lancée dans la lecture de livres audio. Plus précisément, j’ai lu trois livres dans ce format :

Shockaholic, Carrie Fisher [avis lecture]

Un livre de nature autobiographique où l’actrice Carrie Fisher, connue comme la princesse Leia Organa dans Star Wars, parle entre autres de son combat contre la dépression et son expérience avec l’électroconvulsivothérapie (schock therapy).

FISHER, Carrie, Shockaholic, Prince Frederick, HighBridge (Recorded Book), 2014 [2011]. Avis lecture au goodreads.com/lilitherature/.
FISHER, Carrie, Shockaholic, Prince Frederick, HighBridge (Recorded Book), 2014 [2011].

Star Wars : Aftermath (1), Chuck Wendig [avis lecture]

Forte de sa victoire décisive – l’Étoile de la Mort détruite, l’empereur et Dark Vador vaincus –, la Nouvelle République se lance à la poursuite des derniers reliquats de l’Empire.

WENDIG, Chuck, Riposte (Star Wars: Aftermath, 1), Paris, Pocket, 2016 [2015], 480 p. Avis lecture au https://lilitherature.com/2018/10/25/star-wars-aftermath/.
WENDIG, Chuck, Riposte (Star Wars: Aftermath, 1), Paris, Pocket, 2016 [2015], 480 p.

Mais dans l’espace de la lointaine planète Akiva, la riposte impériale…

Norse Mythology, Neil Gaiman [avis lecture]

Description de l’édition française La mythologie viking d’Au diable vauvert : L’univers de Neil Gaiman est nourri par les légendes nordiques. Il revient à ses sources et nous raconte enfin la grande saga des dieux scandinaves qui l’ont inspiré pour son chef d’œuvre American Gods. De la genèse des neuf mondes au crépuscule des dieux et l’ère des hommes, ils reprennent vie : Odin, le plus puissant des dieux, sage, courageux et rusé; Thor, son fils, incroyablement fort mais tumultueux; Loki fils d’un géant et frère d’Odin, escroc et manipulateur inégalable… Fières, impulsives et passionnées, ces divinités mythiques nous livrent enfin ici leur passionnante – et très humaine – histoire.

GAIMAN, Neil, Norse Mythology, New York, HarperAudio, 2017. Avis lecture au goodreads.com/lilitherature/.
GAIMAN, Neil, Norse Mythology, New York, HarperAudio, 2017.

D’une part, quoiqu’il ne s’agisse pas d’un nombre considérable, j’ai suffisamment d’heures d’écoute au compteur pour m’être formée une opinion quant à ce mode de consommation. D’autre part, j’ai essayé de dissocier le contenu des livres de l’expérience audio en elle-même, puisque si vous jetez un coup à mes reviews pour ces ouvrages, vous noterez que deux d’entre eux, Shockaholic et Aftermath, sont notés une étoile et figurent parmi mes lectures les plus décevantes de l’année.


Ce qui m’a convaincu de tenter les audiobooks sont les longues heures passées dans les transports en commun. Comme je souffre du mal des transports, il est difficile pour moi de lire en autobus, spécialement le soir. Les livres audio semblaient ainsi une alternative toute indiquée. Cela dit, certains livres se prêtent mieux que d’autres au format audio selon moi.

Les livres qui se prêtent bien à l’audio

Les livres de nature autobiographique

Il me semble qu’un livre de nature autobiographique, surtout quand il est narré par l’auteur(e) lui/elle-même, est idéal. C’est la raison pour laquelle je me suis attaquée à Shockaholic en premier, un ouvrage à caractère autobiographique narré par Carrie Fisher elle-même. Et si j’avais hâte de terminer le livre à la fin à cause de la redondance du contenu, je peux affirmer que ma lecture aurait été encore plus laborieuse si ce n’avait été de l’excellente narration de l’auteure.

Les livres narrés par l’auteur(e)

D’ailleurs, je pense que tout livre permettant une narration par l’auteur(e) se prête bien à l’audio. Par exemple, Norse Mythology de Neil Gaiman, une sorte d’ouvrage de référence fictionnel, est parfait pour l’audio, car il est narré par Gaiman et que ce dernier est un conteur de talent. Ce livre n’aurait sûrement pas été aussi amusant en version papier.

Les livres que je ne lirais pas en version audio

Les livres longs

J’ai brièvement contemplé la lecture de The Black Prism de Brent Week (une brique), puis j’ai vu le nombre d’heures d’écoute que cela impliquait et j’ai tout de suite abandonné l’idée. Je ne sais pas si c’est effectivement le cas car je ne comptabilise pas mes heures de lecture passées sur un seul et même livre, mais la « lecture » audio me semble beaucoup plus longue que la lecture conventionnelle. Sans doute est-ce logique, puisque la lecture à voix haute prend plus de temps que la lecture à voix basse. Dans tous les cas, la vue d’un livre énorme m’est moins intimidante que la perspective de 40 heures d’écoute. C’est pourquoi il est apparu évident que les longs livres audio n’étaient pas pour moi.

La poésie

THÉORET, France, Bloody Mary, Montréal, TYPO, coll. « Poésie », 2011 [1991], 288 p.
THÉORET, France, Bloody Mary, Montréal, TYPO, coll. « Poésie », 2011 [1991], 288 p.

Un type de littérature que je ne voudrais absolument pas lire en audio est la poésie. Je sais que cela est ironique, puisque la poésie a de solides fondations dans la culture orale. Cependant, la poésie de nos jours ne se conforme pas nécessairement à un schéma défini (par ex., des quatrains avec des vers en alexandrin). Plus encore, la mise en forme d’un texte contribue souvent au sens d’un poème. C’est notamment le cas dans Bloody Mary[1] de France Théoret, où l’auteure déconstruit le langage, ce qui inclut les règles de mise en forme. Ainsi, elle peut laisser de grands espaces blancs entre deux morceaux de texte sur la même page (BM, p. 31), augmenter la taille des caractères d’un passage donné (BM, p. 26) ou supprimer la ponctuation (BM, p. 39). Ce genre de choses ne peut pas se traduire à l’oral, donc il y aurait perte de signification si on faisait de ce recueil une version audio.

D’autre part, je n’ai pas la même capacité d’analyse à l’écoute qu’à la lecture : les sens multiples échappent à mes oreilles. J’ai en effet du mal à croire qu’un recueil comme Fashionably Tales[2] de Marc-Antoine K. Phaneuf puisse conserver sa richesse en livre audio. Pour mieux comprendre, voici un exemple tiré de mon article « L’influence du dispositif rythmique et du travail d’interprétation sur la vitesse de lecture : étude de Je me souviens de Georges Perec et de Fashionably Tales de Marc Antoine K. Phaneuf » :

PHANEUF, Marc-Antoine K., Fashionably Tales : une épopée des plus brillants exploits, Montréal, Le Quartanier, coll. « Série QR », 2007, 189 p.
PHANEUF, Marc-Antoine K., Fashionably Tales : une épopée des plus brillants exploits, Montréal, Le Quartanier, coll. « Série QR », 2007, 189 p.

Lucien a perdu son

chagrin mais Monique

le châle à la gorge

profonde dans ses propos

parade ces jours-ci

en Holstein pour son pimp

ant de mari

FT, p. 20

D’abord, on remarquera un jeu sur les expressions langagières. Je parle ici du vers « le châle à la gorge », qui rappelle l’expression bien connue « avoir un chat dans la gorge ». Ensuite, il faut souligner que l’absence de ponctuation – et de délimitations claires en général – permet au lecteur de réorganiser la structure du poème de diverses façons. Par exemple, il peut lire « mais Monique, le châle à la gorge, profonde dans ses propos… », mais il peut aussi lire « Monique, le châle à la gorge profonde, dans ses propos… ». Dans la même lignée, l’endroit où l’auteur coupe certains vers ouvre la porte à plusieurs interprétations. Ainsi, on peut aligner le mot « profonde » avec le mot « gorge » pour lire « gorge profonde ». On peut aussi laisser le « profonde » sur sa ligne, où on comprend alors que Monique est « profonde dans ses propos ». On peut donc voir comment les sens multiples que génère l’auteur sont dépendants de l’organisation textuelle, ce qui fait du recueil un mauvais candidat pour une transposition à l’audio.


Au final, si je peux voir l’avantage des livres audio en certaines circonstances, notamment en ce qui concerne les œuvres narrées par leur auteur(e) comme Shockaholic ou Norse Mythology, j’ai rapidement constaté que, pour ma part, cela ne deviendrait jamais un mode de lecture privilégié. Je ne m’imagine pas lire des audiobooks en-dehors des livres « légers » où la qualité de l’écriture est de peu d’importance, tel que pour Star Wars : Aftermath (qui est particulièrement mal écrit, cela dit). Du coup, je ne vois pas (ou peu) vraiment l’intérêt.


[1] THÉORET, France, Bloody Mary; suivi de Vertiges; Nécessairement putain; Intérieurs, Montréal, Éditions de l’Hexagone, 1992. Désormais, les références à ce texte seront indiquées entre parenthèses à la suite des citations, avec la mention BM pour « Bloody Mary ».

[2] Marc-Antoine K. Phaneuf, Fashionably Tales : une épopée des plus brillants exploits, Montréal, Le Quartanier, coll. « Série QR », 2007, 189 p. Désormais, les références à ce texte seront indiquées avec la mention FT pour « Fashionably Tales ».

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