The Bear and the Nightingale (Winternight, 1), Katherine Arden
Doté d’une prose magnifique qui évoque le conte de fées sans trop en faire ainsi que d’une collection de personnages complexes (aussi bien les protagonistes que les antagonistes), The Bear and the Nightingale de Katherine Arden est un roman de fantasy – et une critique de la religion chrétienne et du fanatisme – à la mythologie captivante qui vous fera tomber en amour avec le folklore russe.
![ARDEN, Katherine, L'Ours et le Rossignol, Paris, Denoël, coll. « Lunes d'encre », 2019 [2017], 368 p.](https://i0.wp.com/lilitherature.com/wp-content/uploads/2019/05/loursetlerossignol-1.jpg?w=660&ssl=1)
Au plus froid de l’hiver, Vassia adore par-dessus tout écouter, avec ses frères et sa sœur, les contes de Dounia, la vieille servante. Et plus particulièrement celui de Gel, ou Morozko, le démon aux yeux bleus, le roi de l’hiver. Mais, pour Vassia, ces histoires sont bien plus que cela. En effet, elle est la seule de la fratrie à voir les esprits protecteurs de la maison, à entendre l’appel insistant des sombres forces nichées au plus profond de la forêt. Ce qui n’est pas du goût de la nouvelle femme de son père, dévote acharnée, bien décidée à éradiquer de son foyer les superstitions ancestrales.
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Les filles en série, Martine Delvaux
Les filles en série est un essai féministe dans la lignée de Judith Butler. Il s’attarde à des représentations culturelles du féminin de nature diverse : écrits, films, TV, architecture, publicité, célébrités, etc. Cependant, ce qui le démarque, c’est avant tout le style d’écriture de son autrice Martine Delvaux, littéraire sans trop en faire. Ainsi, c’est avec une maîtrise consommée qu’elle montre que si la figure des filles en série est héritée d’une croyance misogyne, il s’agit aussi d’un lieu de subversion.
[avis lecture] [extrait]
![DELVAUX, Martine, Les filles en série: Des Barbies aux Pussy Riot, Montréal, Éditions du remue-ménage, 2018 [2013], 280 p.](https://i0.wp.com/lilitherature.com/wp-content/uploads/2019/01/fillesenserie2018.jpg?resize=660%2C1002&ssl=1)
Des corps féminins en rangées, qui se meuvent en synchronie. Ils ne se distinguent que par le détail d’un vêtement, d’une courbe, d’une teinte de cheveux. Les filles en série créent l’illusion de la perfection. Ce sont des filles-machines, filles-marchandises, filles-ornements. Toutes reproduites mécaniquement par l’usine ordinaire de la misogynie. Les filles sont des filles parce qu’elles sont en série. Mais la figure des filles en série est double: à la fois serial girls et serial killers de l’identité qu’on cherche à leur imposer. Entre aliénation et contestation, les filles en série résistent à leur chosification, cassent le party, libèrent la poupée et se mettent à courir.
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La Minotaure, Mariève Maréchale
La Minotaure, grâce à l’écriture poétique de Mariève Maréchale, est un roman d’une grande beauté. À l’heure où le système cherche timidement à se faire plus inclusif et face à l’incompréhension du public vis-à-vis de la possibilité d’être bigenre ou non binaire, le livre s’impose comme une étrange vulgarisation de la question, laquelle est rendue intelligible à travers le récit d’une expérience subjective. Queer dans le fond comme dans la forme (ex. : fragments, langage épicène), La Minotaure est une œuvre incroyablement importante et terriblement actuelle.
[avis lecture] [extrait] [compte rendu]
« Je n’écris pas pour me faire comprendre ; j’écris parce qu’à l’intérieur de moi il y a une petite fille effrayée. J’écris parce que les livres de Nelligan, d’Hébert et d’Agnant brûlent entre mes mains. Parce que je rêve sans cesse à des yeux qui saignent. Je ne demande aucun médicament, aucune rédemption. J’écris pour arrêter des histoires. Les plus toxiques. Les plus violentes. Les plus communes et blanches. »
La Minotaure est un roman dans lequel une narratrice particulièrement terrifiée par l’idée de vivre témoigne de son enfance à travers des notes pour comprendre la source de ses effrois. La plupart de ses courts textes sont adressés à Maude, une amie décédée. Ce (faux) dialogue lui permet de tisser des liens entre son enfance et son âge adulte, et entre sa vie et sa mort qui, croit-elle, la guette à cause de cette tentation d’exister.
C’est le récit d’une parole qui ose s’affirmer, d’une personne qui décide enfin d’exister à travers un nœud de violence patriarcale, blanche, impérialiste, de genre et de classe sociale qui l’étouffe, la transperce et l’invisibilise. C’est surtout l’histoire d’un millier de miroirs qui brisent sous une terrible impulsion à vivre.
Superhéroïnes, Barbi Marković
Nos trois superhéroïnes – des sorcières – œuvrent dans un futur plus ou moins proche où tous les défauts de la société de surconsommation sont exacerbés, ce qui est l’occasion d’une critique sociale à l’humour délicieusement cynique. Barbi Marković, en mêlant un cadre de science-fiction, une prémisse de fantasy et un propos contemporain, crée un roman à la fois familier et étrange, à l’instar de la forme inusité qu’adopte Superhéroïnes (par exemple, l’inclusion de petites annonces). Enfin, soulignons la grande qualité de la traduction de Catherine Lemieux.
[avis lecture] [analyse d’extrait]
Trois superhéroïnes se rencontrent dans un petit café malfamé de Vienne. Chaque samedi, elles discutent de leur sujet favori: comment utiliser à bon escient leurs superpouvoirs – la foudre et l’extermination – pour améliorer la vie de leurs proches, celle des pauvres et des laissés-pour-compte. Les trois héroïnes, immigrantes, sont extrêmement conscientes de leur statut d’étrangères. Et malgré leurs pouvoirs, elles doivent composer avec les problèmes de la vie quotidienne: emplois sous-payés, santé précaire et, par-dessus tout, leurs origines culturelles. Car il n’est jamais possible pour les trois protagonistes de se sentir chez elles, ni d’être acceptées dans la société: elles sont coincées.
Oscar De Profundis, Catherine Mavrikakis
La plume de Catherine Mavrikakis est toujours magnifique, mais je n’ai pas de mots pour dire à quel point ce roman est bien écrit et construit. Le style, l’emploi judicieux des champs lexicaux (ex. : les pauvres associés au registre de l’animalité), une variété de procédés formels, l’intertextualité… Unique 5 étoiles de mon année lecture, Oscar De Profundis est un chef-d’œuvre!
Une épidémie mortelle ravage Montréal. Depuis la création de l’État mondial, des hordes de miséreux errent dans la ville. Certaines zones leur ont même été temporairement abandonnées afin de les maintenir à distance des nantis des banlieues. Des troubles éclatent. Avant qu’il ne soit trop tard, Cate, la chef d’une des bandes de crève-la-faim, veut frapper un grand coup.
Le chanteur Oscar De Profundis, devenu star planétaire, est de retour après une longue absence. Sa ville natale reste emplie de souvenirs funestes. Pour ses fans, particulièrement nombreux et fervents, il vient donner deux concerts extraordinaires. Cependant, l’état d’urgence est déclaré et, pour sa protection, Oscar doit demeurer confiné dans la somptueuse maison où son homme de confiance l’a installé avec toute l’équipe De Profundis.
Durant la nuit, Oscar, envahi de sombres visions de son passé, ne parvient pas à trouver le sommeil malgré les calmants de toutes sortes. Il ignore la peste qui sévit à l’extérieur. Comme toujours, il s’absorbe dans la préservation des cultures en voie de disparition. Il élabore musées et mausolées à la gloire d’un monde francophone englouti dans la culture mondiale.
Dehors, la rumeur continue de gronder. Avec l’aide de complices, dont les fidèles Balt et Mo, ainsi qu’Adrian, le vieux libraire, Cate s’apprête à tenter l’impossible et à faire jouer à Oscar un rôle déterminant dans la révolte des pauvres.
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Mistborn, Brandon Sanderson
Techniquement, je n’ai pas lu toute la trilogie en 2019, seulement le second tome, The Well of Ascension, et le troisième, The Hero of Ages. Cela dit, je crois qu’il est plus pertinent de parler de mon appréciation pour la trilogie dans son ensemble que des deux livres séparément. L’intrigue est solide, le système de magie complexe et le world-building intéressant. Mistborn a un peu de tout pour les amateurs de fantasy épique.
L’Empire Ultime
![SANDERSON, Brandon, L’Empire ultime (Fils-des-brumes, 1), Paris, Le Livre de Poche, 2011 [2006], 928 p.](https://i0.wp.com/lilitherature.com/wp-content/uploads/2019/01/lempireultimelivredepoche.jpeg?resize=269%2C435&ssl=1)
Les brumes règnent sur la nuit, le Seigneur Maître sur le monde.
Vin ne connaît de l’Empire Ultime que les brumes de Luthadel, les pluies de cendre et le regard d’acier des Grands Inquisiteurs. Depuis plus de mille ans, le Seigneur Maître gouverne les hommes par la terreur. Seuls les nobles pratiquent l’allomancie, la précieuse magie des métaux. Mais Vin n’est pas une adolescente comme les autres. Et le jour où sa route croise celle de Kelsier, le plus célèbre voleur de l’Empire, elle est entraînée dans un projet fou : renverser l’Empire.
- Les livres sur cette liste ne sont pas nécessairement parus en 2019. Il s’agit simplement de livres que j’ai lus cette année.
- Ils ne sont pas classés ci-dessous en ordre de préférence, mais en ordre alphabétique d’auteur.
- Mon opinion est bien évidemment subjective et m’est personnelle.