Couverture du livre Le boys club Martine Delvaux

Le boys club et ses clubs pour hommes profanés par Martine Delvaux

Le boys club[1] de l’autrice québécoise Martine Delvaux est un essai féministe paru aux Éditions du remue-ménage en octobre 2019. Il s’attarde au « boys club » en général et à quelques-uns de ses clubs en particulier.

Profaner le boys club

Les hommes forment un vaste réseau solidaire résolu à se maintenir au pouvoir au détriment des femmes, des non-blancs et des non-hétérosexuels. Cette organisation se répète à l’infini à travers une multitude de confréries : les clubs privés eux-mêmes; l’armée; l’Église; les fraternités; les incels; la Silicon Valley; la ligue du LOL; le milieu de l’architecture; etc. Autant de groupes qui reproduisent les attitudes et les comportements discriminatoires associés à la masculinité toxique, justifiée par la devise « boys will be boys ».

Le livre expose tout cela et plus encore. Ce n’est qu’ainsi, selon l’écrivaine, qu’on peut profaner le dispositif patriarcal :

Et profaner, ici, c’est faire l’effort de penser la structure du boys club, le système.

p. 179

L’invisible omniprésence des hommes

La plupart des ouvrages féministes[2] s’intéressent à la place des femmes dans notre société. Le boys club cherche plutôt à mettre en lumière l’omniprésence des hommes blancs hétérosexuels, « une non-mixité si vaste, si étendue, si généralisée, si ordinaire, en somme, qu’elle passe inaperçue » (p. 12).

Il s’agit d’un angle qui, s’il n’est pas absolument inédit, demeure rafraîchissant. Par l’intermédiaire d’un montage d’exemples, la militante féministe espère que « le voir provoque un passage à l’action » (p. 19). Elle démontre toute la perversité du boys club en tant que « mécanisme du pouvoir » (p. 21) en révélant le lien qui existe entre ses différentes expressions.

Ce rapport s’avère magnifiquement illustré par l’habileté avec laquelle l’autrice passe d’un sujet et d’une section à l’autre. Par exemple, dans le chapitre 11, elle affirme que « la ville appartient aux hommes, à plus forte raison dès le coucher du soleil » (p. 73). Dans le chapitre 12, elle explique pourquoi c’est le cas : « La majorité des architectes, et de ceux qui sont retenus par l’histoire ou qui jouissent actuellement d’une réputation internationale, sont des hommes blancs » (p. 82). Le chapitre 13, quant à lui, parle du film Le règne de la beauté de Denys Arcand, qui dénonce l’arrogance d’un homme blanc architecte « convaincu que ce qu’il dessine est fondateur » (p. 93).

Pas comme un roman

Personnellement, j’ai dévoré ce livre « comme un roman ». Cependant, ce n’en est certainement pas un. Des formules stylisées telles que « À la manière d’une agression sexuelle commise sous HGB » (p. 123) témoignent des origines littéraires de le la militante. D’autres tendances, toutefois, soulignent plutôt son bagage académique.

D’abord, elle prend un total de trois chapitres afin de présenter sa position et sa méthode. Dans l’éventualité où cela n’aura pas découragé le lectorat mainstream, la multiplication des références et des notes de fin le fera sans doute. Si ce procédé octroie théoriquement de la crédibilité au propos de l’écrivaine, il le rend aussi moins accessible.

Continuer à dire

Pour cette raison, Le boys club n’atteindra peut-être pas un public général. Pourtant, il s’agit d’un essai incroyablement important, comme le démontrent les attaques que subit fréquemment Martine Delvaux dans les médias et sur les réseaux sociaux[3]. Malgré tout, l’autrice québécoise est déterminée à « continuer à dire […] ce qu’[elle est] convaincue qu’il est nécessaire de dire » (p. 185). Lisons cet ouvrage, pensons le système patriarcal et disons à notre tour.

Se procurer Le boys club

Couverture du livre Le boys club Martine Delvaux
DELVAUX, Martine, Le boys club, Montréal, Éditions du remue-ménage, 2019, 227 p.


[1] Martine Delvaux, Le boys club, Montréal, Éditions du remue-ménage, 2019, 232 p. Désormais, les références à cet ouvrage seront indiquées entre parenthèses avec le numéro de page pertinent.

[2] Cela inclut Les filles en série : Des Barbies aux Pussy Riot de Martine Delvaux paru une première fois aux Éditions du remue-ménage en 2013, puis réédité en 2018. Mon avis lecture sur cet ouvrage féministe est disponible sur ce site.

[3] On n’a qu’à penser aux insultes répétées de Richard Martineau et de Sophie Durocher dans le Journal de Montréal.

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